DOGE, l’efficacité vraiment ? Un gros pavé Dans les algorithmes qui fait une sorte de revue de presse-bilan de la prise du système informationnel de l’État fédéral US par Musk et Trump. Ça va un peu dans tous les sens, mais il y a plein de choses pertinentes. Et inquiétantes.
[…] le Doge est la synthèse de trois courants politiques : celui des
marchés et des startups qui souhaitent un retour sur investissement, celui des
think-tanks conservateurs anti-New Deal qui souhaite un État incapable de
promouvoir la justice sociale ; et le monde extrêmement connecté de
l’anarchocapitalisme et de l’accélérationnisme de droite, qui souhaite un État
brisé qui cède l’autorité gouvernementale à des projets concurrents de
gouvernance privée décentralisée.Hubert Guillaud
— DOGE, l'efficacité vraiment ?
Sur le même sujet, Le Grand Continent fait également un bilan d’étape que j’ai trouvé de bonne qualité, et plus court (également partagé par @Khrys) : D.O.G.E. : anatomie du coup d’État numérique d’Elon Musk.
Scientifiques, soyez wokes !. Un billet du site Zet-éthique : méta-critique qui malgré son titre provocateur est utile, parce qu’il tente de remettre à jour des débats épistémologiques enfouis sous le stigmate d’extrême droite.
Rêver en matérialistes internationalistes. Une réponse sur Contretemps au texte de Houria Bouteldja que le même site avait publié, et que j’avais relayé ici. Ce qui m’avait intéressé dans le texte de Houria, c’est l’idée que pour rassembler des forces capables de résister, voire de renverser notre monde devenu fasciste, il faudra accepter de s’associer avec des groupes n’ayant pas la même vision du monde. Par contre, invoquer la transcendance et la France ne pouvait pas me convenir. Et pas seulement parce que je ne suis pas français. Par contre, je suis matérialiste. C’est ma façon de trouver le monde enchanteur. Quand même un peu. Et donc, cette réponse me fait du bien à lire.
Notre communisme, ou notre écosocialisme, car il s’agit bien de ça, n’est pas
qu’une « idée » ou un « rêve », il est à la fois l’objectif et le mouvement
lui-même. Nous le souhaitons à la fois imaginaire et praxis. Cela ne nous
empêche pas de nous poser des questions stratégiques multiples à l’heure des
prises de pouvoir de l’extrême droite, de l’émergence d’une nouvelle
internationale néofasciste, des alliances entre néolibéraux et réactionnaires
au niveau national, et notamment en France ; de reconnaitre l’urgence du moment
et nos limites – et mille contradictions – face au danger imminent. Nous
sommes aussi d’accord qu’il faut trouver les voies pour briser la ligne de
couleur qui traverse notre classe et l’unifier. Mais les luttes sociales
réelles sont en ce sens notre boussole et un vecteur essentiel. Elles seules
permettent de poser vraiment les autres questions stratégiques à débattre :
celle de l’État, de la nécessité de construire des organisations politiques
solides, de la participation ou non aux élections ou aux institutions, de nos
projets de sociétés, etc.
Revivifier la démocratie des mouvements est le gage de la vitalité des
résistances et victoires de demain. Cultiver un internationalisme concret
également, contre nos propres impérialismes, en soutien aux migrant·es et à
tous les peuples en lutte, voilà ce qu’il faut faire immédiatement, selon
nous. Les syndicalistes du début du vingtième siècle parlaient des
grèves comme d’une « gymnastique révolutionnaire ». À nous d’en trouver des
échauffements, des mouvements, des exercices nouveaux pour les (mauvais) temps
qui sont les nôtres. Partout dans le monde, sans patrie ni frontières.
Yoletty Bracho, Alexis Cukier, Franck Gaudichaud, Théo Roumier et Vincent Gay
— Rêver en matérialistes internationalites
Inférences : comment les outils nous voient-ils ?. Encore un texte Dans les algorithmes sur tout ce qui est inféré à partir d’une image partagée en ligne, j’imagine dans les goulags numériques genre Facebook, Whatsapp et autres clouds de l’accumulation primitive du capital.
ALA statement on White House assault on the Institute of Museum and Library Services. Une réaction de l’association américaine des bibliothèques à propos de la fermeture de l’Institut des services de musée et de bibliothèque. Une preuve de plus que l’objectif n’est pas de faire des économies, mais bien de détruire les services publics qui donnent du pouvoir à la plèbe.
Un fascisme tardif ? Entretien avec Alberto Toscano. Un entretien publié sur Contretemps, avec l’auteur d’un livre sur le fascisme contemporain. C’est plein de considérations intéressantes, qui aident à comprendre notre époque.
Dans son essai intitulé « Le modèle de la propagande fasciste », il [Adorno]
déclare : « Contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, les foules
fascistes ne croient pas vraiment leurs dirigeants. » Il s’agit d’une
forme de ce qu’il appelle le « fanatisme factice ». Cela implique déjà
une grande part de réflexivité, de cynisme et de jeu. Adorno ajoute : « Cela ne
le rend pas moins violent, mais encore plus violent dans sa réponse. »
[…]
Jesi cite une phrase célèbre d’un général phalangiste qui entre dans les
couloirs de l’université de Salamanque en criant : « Viva la muerte. Abajo la
inteligencia ». Vive la mort, à bas l’intelligence. C’est un slogan fasciste
très pertinent.
Ce pessimisme a une affinité affligeante avec certains imaginaires du
déclin, de l’effondrement ou de la dégradation. Je pense que ce serait une
erreur d’interpréter les mythes ou la philosophie du fascisme comme étant ceux
qui croient réellement qu’ils vont créer une Rome éternelle ou une forme
durable de suprématie blanche. Je ne pense pas que ce soit nécessairement le
cas. Je pense que c’est la raison pour laquelle il y a aussi la
dimension nihiliste et la dimension sacrificielle.
[…]
L’une des choses qui m’a complètement stupéfié, et qui reste stupéfiante, c’est
la vitesse à laquelle le trope polémique de l’idéologie du genre et de la
menace trans pour toute normativité a circulé. Je pense que la goutte d’eau qui
a fait déborder le vase est arrivée lorsque j’ai vu un discours de Bachar
al-Assad où il parlait de l’idéologie du genre. J’ai pensé : « Comment est-ce
devenu une fixation idéologique bizarre qui circule partout ? »
Bien sûr, on peut dire que cet excès superstructurel a un effet de diversion
très efficace. Mais je pense aussi qu’il y a une manière dont la
corporalité intime sert à cartographier sur le corps un sentiment de défaite ou
de crise systémique. […] Empiriquement, l’idéologie anti-genre de la
transphobie sert aujourd’hui de langage universel à l’extrême droite.
Alberto Toscano, Evan Calder Williams
— Un fascisme tardif ? Entretien avec Alberto Toscano
À propos d’une affiche : la nécessité d’une approche matérialiste de l’antiracisme. Tsedek ! revient sur les réaction à l’affiche de LFI, illustrée par un portrait menaçant d’Hanouna. L’avis me semble utile. Le contexte d’énonciation est important. C’est malheureusement aussi ce qui explique une partie des réactions : un visuel de LFI, contre le racisme, c’est déjà suspect. De ce point de vue, je trouve que cette affiche est contre-productive et simplement une erreur. Utiliser un outil de génération d’image pour créer une affiche, c’est déjà un problème. Surtout pour porter un discours antiraciste, et donc pour lutter contre l’antisémitisme. C’est justement l’occasion d’éviter tout effet visuel. Le fond suffit, la forme peut être sobre. Il est plus que nécessaire d’abandonner les réflexes de communication, qui participent au problème. Les laisser aux ennemis.
Let Us Join Together to Defend the Rule of Law. Quand une association de spécialistes du droit constitutionnel cherchent à faire pression sur l’exécutif US pour qu’il respecte la loi, notamment parce que le respect de la loi, c’est bon pour les affaires. Parce qu’il semble que le bel échafaudage des checks and balances ne repose que sur la simple bonne volonté, la croyance dans la démocratie.
The ABA statement appropriately urged all lawyers to join together in a single
resounding voice to demand the Trump administration’s adherence to the
rule of law. The American Constitution Society statement of March 10,
2025, similarly argued that lawyers have a responsibility to fight back against
attacks on the rule of law that would fatally undermine the legal system they
are meant to uphold. And while some other legal organizations have spoken up,
the response has been much too anemic.Steven M. Salky, Esq.
— Let Us Join Together to Defend the Rule of Law
“We Live in a Fascist Dictatorship”: Elie Mystal on Trump’s Lawlessness, Attacks on the Judiciary. Un sujet du média US Democracy Now sur l’attaque frontale de l’exécutif US contre les fondements du mécanisme constitutionnel du pays des hommes libres, du moins lorsqu’ils sont perçus comme blancs, mâles et propriétaires des moyens d’existence des autres.
ELIE MYSTAL: So, Amy, people have told me from the jump, from November 5th,
when he was elected, that the courts would save us, that the courts would
restrain him, that the courts would be the final guardrail preventing his
military dictatorship. And I have said from the jump that the courts will not
save us, that they cannot save us, because they cannot enforce their own
decisions. The executive enforces the courts’ decisions. And if you have an
executive like Trump who is willing to ignore court orders, then there’s
nothing courts can do.
[…]
My response to Trump violating a court order, violating multiple court orders,
is the people have to lead, because the courts will not do it. The courts
cannot do it. You want to free Khalil? We need to go to Jena and free
Khalil. Like, that’s what it takes.
Democracy Now
— "We Live in a Fascist Dictatorship": Elie Mystal on Trump's Lawlessness, Attacks on the Judiciary
Tribune et calendrier de Stand up for science. Le blog RogueESR publie la tribune de Stand up for science, qui réaffirme l’indépendance de la recherche et des études, la nécessité d’un financement stable, l’importance de se débarrasser de l’évaluation qui n’est qu’une mise au pas, de reprendre l’écosystème de la publication scientifique aux griffes capitalistes. Faire face aux autoritarismes et crises contemporaines.
Trump et le fascisme historique. Nous devons affronter la réalité !. Contretemps traduit et publie un texte qui évalue un certain nombre d’arguments qui ont été utilisés pour affirmer que Trump, c’est peut-être de l’autoritarisme, mais ce n’est pas équivalent au fascisme ou au nazisme. C’est un texte utile qui rappelle quelques éléments sur notre compréhension du fascisme.
Mercantilisme et capitalisme de la finitude : aux origines de l’Empire Trump. Le titre est pas terrible, mais l’idée, assez convaincante, c’est que le capitalisme selon les périodes prend des formes différentes (et déjà rien que ce rappel est bon à prendre, même s’il n’est pas neuf. Selon l’auteur, ces formes oscillent entre deux types, celui qu’on a connu depuis 1945, à savoir la version libérale (surtout au sens économique), avec une insistance sur la liberté de commerce et la concurrence (au moins des les discours), et une autre, qui s’est appelée mercantilisme et que l’auteur définit comme le capitalisme de la finitude. Et il semble que depuis quelques temps, on (re)bascule vers ce type là, et on assiste ces derniers mois à une accélération. D’où le retour des tarifs douaniers, des logiques impériales, y compris avec l’annexion de territoires, et des logiques de monopoles privés, publics, ou d’un mélange des deux.