iGor milhit

Lundi, décompte

Assise à table, verre de blanc à portée de main, face au village, face au hameau des origines, face à La Montagne Sacrée, face à la lumière. Face au destin, dont le degré d’incertitude s’est réduit. Elle affronte la vie qui grince des dents, courageuse, un peu rageuse peut-être, et envoie tout rigoler, prépare des peaux de bananes pour La Mort, qui fait moins la fière et assure les jointures de ses os. On ne sait jamais, c’est quand même un puzzle compliqué un squelette, surtout lorsqu’il doit s’assembler tout seul.

On rigole, on rigole, c’est facile de penser à La Fin lorsqu’elle se situe dans une portion floue de l’avenir, un peu moins lorsqu’un proche, qu’une proche ne retourne plus à la ligne, mais depuis le chapitre suivant on malaxe son deuil. Là, elle est annoncée, sur la voie 4, toujours dans la même direction, l’horaire n’est pas clair, mais c’est pour bientôt. Et il faut se lever le matin, faire la vaisselle, remplir des papiers, classer ses émotions, peut-être soutenir son entourage, soutenir ses soutiens, bref, vivre sans attendre, parce qu’on sait bien à quoi s’attendre.

En théorie, ce n’est pas si différent, au jour le jour. En théorie. Parce qu’en pratique, on pratique la diversion, on botte en touche, on gratte le papier, on taquine le clavier qwertz, surtout on travaille, la sainte drogue réservée aux prédestiné·es du Marché de l’Emploi, ce dieu sans pitié ni justice.

En pratique, c’est surtout le fardeau qu’on se met soi-même sur le dos, oh, on a bien appris à le faire, mais on pourrait désapprendre un peu, toute cette culpabilité poisseuse, qui n’apporte rien d’autre que sa poisse.

Là-bas, dans le coude de la vallée du Rhône, bientôt, se lève le soleil.